Présidentielle 2025 : Me Akere Muna saisit le Conseil constitutionnel pour inéligibilité de Paul Biya

Dans une requête déposée le 18 août, Me Akere Tabeng Muna, candidat à la magistrature suprême et ancien bâtonnier de l’Ordre des avocats du Cameroun, demande officiellement au Conseil constitutionnel de constater l’inéligibilité de Paul Biya, président sortant et candidat du Rassemblement Démocratique du Peuple Camerounais (RDPC).

Le Conseil constitutionnel a fixé l’audience de cette affaire au vendredi 22 août 2025 dès 11H00, une échéance cruciale qui pourrait rebattre les cartes du scrutin.


L’argument central : l’article 118 du Code électoral

L’avocat s’appuie sur l’article 118(1) du Code électoral qui déclare inéligibles «les personnes qui, de leur propre fait, se sont placées dans une situation de dépendance […] vis-à-vis d’une personne, d’une organisation ou d’une puissance étrangère». Selon lui, le chef de l’État âgé de 92 ans se trouve dans une situation manifeste de dépendance physique, cognitive et politique, rendant impossible l’exercice autonome du pouvoir présidentiel.


Gouvernance par procuration et absence publique

Dans sa requête, Me Muna souligne que Paul Biya n’a pas déposé personnellement sa candidature à ELECAM et n’est pas apparu devant le public depuis le lancement du processus électoral. Il rappelle également que :

  • le président n’a pas présidé le Conseil supérieur de la magistrature depuis six ans,
  • le RDPC n’a pas organisé de congrès depuis une décennie,
  • le Conseil des ministres ne s’est plus tenu depuis vingt ans.

Ces absences, selon lui, traduisent une gouvernance par procuration, où des tiers non élus donnent des «hautes instructions» au nom du président. Un aveu corroboré, dit-il, par une publication du ministre de la Justice dans le journal Justicia (janvier 2024), dénonçant «injonctions» et «impostures» pesant sur le système judiciaire.


Dépendance médicale et risque pour la souveraineté

Autre point sensible : la santé du président. Les hospitalisations récurrentes de Paul Biya en Europe, notamment en Suisse, seraient la preuve d’une dépendance médicale étrangère, exposant le Cameroun à des pressions extérieures. Contrairement à d’autres dirigeants africains comme Patrice Talon (Bénin) ou Mohammed VI (Maroc), Paul Biya n’a jamais communiqué officiellement sur son état de santé, créant un «black-out médical incompatible avec l’État de droit», selon la requête.


Les demandes d’Akere Muna

Me Muna sollicite du Conseil constitutionnel :

  1. La constatation de l’inéligibilité de Paul Biya au regard de l’article 118 du Code électoral.
  2. À défaut, la comparution personnelle du président sortant devant le Conseil pour évaluer son aptitude physique et cognitive, ou la présentation d’un dossier médical complet établi par une commission indépendante.
  3. L’application éventuelle de l’article 128 du Code électoral, qui permettrait au RDPC de proposer un candidat de remplacement dans un délai de trois jours.

Une requête explosive pour le processus électoral

Cette démarche sans précédent pourrait bouleverser la campagne présidentielle. Elle met en lumière des interrogations anciennes mais rarement traitées publiquement : qui gouverne réellement le Cameroun ? Et surtout, la candidature de Paul Biya, déposée pour un huitième mandat, peut-elle résister à un examen de conformité constitutionnelle rigoureux ?

La décision du Conseil constitutionnel, attendue après l’audience du 22 août 2025, pourrait marquer un tournant majeur dans l’histoire politique du Cameroun.

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